Malgré sa nature discrète (il aura eu le souci de laisser le moins possible d’images de lui-même), Henri Cartier-Bresson fut et demeurera une figure mythique de la photographie du XXe siècle. Sa longévité lui permit une traversée du siècle dont il témoigne à travers les photographies de ses événements majeurs, pendant près de cinquante ans. Et son talent précoce lui fait réaliser, âgé d’une vingtaine d’années seulement, un grand nombre de chefs-d’œuvre de l’histoire de la photographie.
Henri Cartier-Bresson ne fut jamais un débutant. Équipé du nouvel appareil de poche Leica et d’un simple objectif 50 mm, il adopte dès ses premiers instantanés le style d’une photographie directe qui ne supporte ni la pose, ni la retouche, ni le recadrage, et proscrit le flash, qu’il craint « comme la détonation d’un revolver au milieu d’un concert ». À Paris, en 1932, Le Pont de l’Europe saisit la course d’un piéton au-dessus d’une flaque d’eau ; derrière lui se découpe la gare Saint-Lazare. L’image est un condensé de l’art sans artifice de Cartier-Bresson : un cliché pris à la sauvette, en cet « instant décisif » qui suspend le mouvement dans une éternité, moment où tout se complexifie du fait d’infinis reflets dans l’eau, d’un jeu surréaliste entre rêve et réalité, et par-dessus tout, de l’expression même, fugitive, de l’élégance et de la légèreté.
De cette grâce combinée de l’image et du piéton aérien naît la tentation de voir ici l’autoportrait bien involontaire d’un photographe agile, qui, sans que personne ne le remarque jamais, avait l’habitude de sortir son Leica pour deux ou trois prises furtives et définitives. Faisant corps avec son appareil, qu’il considérait comme un prolongement de son œil, Cartier-Bresson exécutait auprès de ses modèles une manière de chorégraphie évoquant, pour Truman Capote, « une libellule inquiète ».
Né à Chanteloup (Seine-et-Marne), Henri Cartier-Bresson découvre le travail des peintres surréalistes à l’âge de 15 ans. Entre 1927 et 1928, il suit les cours du cubiste André Lhote à Paris. En 1931, il se rend en Côte d’Ivoire où il réalise ses premières photographies. À son retour, il achète son premier Leica — un appareil photographique extrêmement maniable qui deviendra son plus fidèle complice — et se consacre dès lors entièrement à son art qu’il pratique, à l’instar des surréalistes, comme une écriture automatique appliquée au monde de l’image. Dès 1932 est organisée à la galerie Julien Levy (New York) sa première exposition de photographies. C’est à l’occasion d’un voyage en Espagne, en 1933, qu’il réalise ses premières grandes photographies de reportage. Il séjourne ensuite un an au Mexique pour une mission ethnographique (1934) et expose aux côtés du Mexicain Manuel Álvarez Bravo à Mexico.
Henri Cartier-Bresson se rend ensuite aux États-Unis où il étudie le cinéma auprès du photographe américain Paul Strand (1935). Il assiste le cinéaste Jean Renoir sur La vie est à nous (1936), Une partie de campagne (1936, sorti en 1946) et la Règle du jeu (1939). De même, il réalise personnellement deux documentaires sur l’Espagne — Victoire sur la vie et l’Espagne vivra (1937).
Commence alors pour lui une importante carrière de photojournaliste, caractérisée par la recherche constante du « moment décisif » défini comme l’instant le plus significatif d’une réalité donnée. Souhaitant abolir la frontière entre art et document photographique, il publie son célèbre recueil Images à la sauvette (1952). C’est en préface de cet album qu’il développe sa conception de la photographie dans « l’Instant décisif », un texte devenu référentiel. À cet égard, Henri Cartier-Bresson a donné la définition la plus concise et la plus précise de l’acte photographique : « La photographie est, dans un même instant, la reconnaissance de la signification d’un fait et de l’organisation rigoureuse des formes perçues visuellement qui expriment et signifient ce fait. » Henri Cartier-Bresson est fortement marqué par les années de guerre. Prisonnier ayant réussi à s’évader, il photographie la libération de Paris en août 1944 et sort un documentaire sur les prisonniers de guerre et les déportés (le Retour, 1944-1945).
En 1946, il séjourne de nouveau aux États-Unis afin de finaliser une exposition de son œuvre au MoMA de New York — manifestation à l’origine « posthume », l’artiste vivant dans la clandestinité ayant été déclaré disparu. En 1947, Henri Cartier-Bresson fonde avec quatre autres photographes indépendants — Robert Capa, George Rodger, David Seymour et William Vandivert — l’agence coopérative Magnum Photos, qui porte le reportage à son apogée tant dans le domaine des grands conflits historiques que sur la scène sociale, politique et privée. De 1948 à 1950, il passe trois ans en Orient : en Inde, il photographie Mohandas Gandhi quelques heures avant son assassinat ; il est en Chine lors de la proclamation de la République populaire et témoigne de la victoire du communiste Mao Zedong ; il parcourt l’Indonésie alors qu’elle accède à l’indépendance. En 1954, Henri Cartier-Bresson est le premier photographe occidental à être admis en Union soviétique. Quatre ans plus tard, il effectue un nouveau voyage en Chine, à l’occasion du dixième anniversaire de la République populaire. En 1963, le photographe est à Cuba pour Life Magazine, puis au Mexique. En 1966, il s’éloigne de l’agence Magnum qui conserve toutefois le droit d’exploitation de ses archives.À partir de 1974, l’artiste se consacre à la photographie de portrait et de paysage, et reprend en parallèle le dessin et la peinture. « Bresson » © Ecrit par E. BUCHOT. Sources : Encarta, Wikipedia
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